lundi, mai 14, 2018

"Cette putain si distinguée" de Juan Marsé (Espagne)

Un écrivain – double de l’auteur ? – est sollicité pour écrire, sur commande le scénario d’ «un film inspiré d’un fait réel qui s’était produit des années plus tôt à Barcelone, un crime horrible qui avait en son temps suscité des conjonctures nombreuses et très diverses, et dont le mobile, apparemment passionnel, n’avait jamais été entièrement éclairci ».
Nous sommes en 1982. Le narrateur, en panne d’inspiration, accepte bon gré mal gré de revenir sur cette histoire, même s’il mesure bien la différence entre écriture de scénario et littérature. Ce crime s’est déroulé en 1949, en pleine période franquiste, et le meurtrier, un certain Fermin Sicart, travaillait alors comme projectionniste dans un cinéma de quartier, le cinéma Delicias. Régulièrement une prostituée venait lui rendre visite dans sa cabine de projection, et le protagoniste semblait apprécier sa compagnie, et pourtant on l’a retrouvée un jour morte, étranglée avec de la pellicule de cinéma, et Sicart a avoué aussitôt en être le meurtrier.

mercredi, avril 18, 2018

"C’est l’Inuit qui gardera le Souvenir du Blanc" de Lilian Bathelot (France)

Alors que, lors de l’une de nos réunions mensuelles, nous parlions de « Simple mortelle », le dernier roman paru de Lilian Bathelot, Catherine nous a fait passer quelques uns de ses titres plus anciens. C’est comme cela que C’est l’Inuit qui gardera le Souvenir du Blanc m’est arrivé dans les mains et que je me suis régalée de ce roman d’anticipation très réussi, écrit - nous dit-on - à l’attention des adolescents…
Nous sommes projetés au printemps 2089, et les antagonismes du monde actuel se sont cristallisés. Dans les pays du G16, il y a désormais deux types de territoires : les zones sécurisées où les citoyens bien intégrés sont tous implantés, c’est à dire qu’ils ont sous la peau une puce qui leur permet l’accès à tous les services vitaux et qui permet donc aussi de les pister ; et les zones franches où vivent ceux qui ne rentrent pas dans le moule, donc globalement plutôt tous les déshérités. Et puis il y a tous les pays membres de la Confédération des Nations Premières qui sont encore habités par leurs peuples indigènes…

dimanche, avril 15, 2018

"El murmullo de las abejas", de Sofía Segovia (Mexique)

Sofía Segovia est une écrivaine mexicaine, née en 1965 à Monterrey. El murmullo de las abejas est son deuxième roman, paru chez Vintage Español en 2015.

Nous sommes au début du 20e siècle dans le nord du Mexique, dans la petite ville de Linares. Le contexte est important : c'est celui de la Révolution puis de la réforme agraire.

« Olvidó el hambre. Olvidó el frío.
Y así, fuera de la vista del patrón, que no se había detenido a esperar la llegada de su obediente peón, padre e hijo observaron al otro padre y al otro hijo batallar para hacer cinco pozos mal hechos, y al verlos, campesinos torpes, altos, blancos y elegantes, corroboró lo que siempre había creído : el campo le pertenecía al que lo trabajaba, al que sabía hacer las cosas, al que sabía sembrar, y no al que lo supervisa todo desde arriba de un caballo sin ensuciarse las manos.
- Esta tierra es mía. »

mercredi, avril 11, 2018

"Le dernier invité" de Anne Bourrel (France)

Anne Bourrel est une écrivaine montpelliéraine. Elle écrit des nouvelles, des romans noirs, de la poésie et des pièces de théâtre.
Son dernier roman, Le dernier invité, vient de paraître chez La manufacture de livres.

« Elle devrait se détendre un peu. La rivière court vers la mer. Il fait beau. Tout à l'heure, elle épousera l'homme qu'elle aime. Vivre pourrait être envisageable. Avec le retour de ce sale type, pile la semaine de mon mariage, me détendre ? C'est normal d'y repenser. Je pense, mais je ne parle pas. Plus jamais. Plus jamais je ne parlerai. Pas de mots. Il n'y a pas de mots pour dire ce que personne ne veut entendre. Il faut se taire. Pas un mot. Ce qui n'est pas dit n'existe pas. L'eau fraîche de la rivière parviendra à chasser les images. Il faudrait pouvoir tourner la page, je le sais bien. Tourne la page, tourne, tourne. Ne la laisse pas se déchirer, la page. C'est toi qui la tournes, encore, essaye, tourne-la. Tourne-la. La page de pierre et de plomb. Ou bien plonge, plonge dans l'oxbow toute habillée. »

dimanche, mars 25, 2018

Livres libres ! Un dispositif Les Collecteurs - Mpt Frédéric Chopin...





Comme vous le savez sûrement, depuis quelques mois déjà, les Collecteurs ont le privilège de se réunir un samedi par mois à la Maison pour tous Frédéric Chopin (Montpellier). C’est donc en collaboration avec son responsable, Thomas Roudet, que nous avons le plaisir de mettre en œuvre un partage de livres ouverts aux « tous » de la Maison pour tous !

« Des animaux très sensibles » de Rodrigo Fuentes (Guatemala)

Les attachantes éditions L’atinoir nous emmènent cette fois au Guatemala en nous faisant découvrir un recueil de nouvelles de celui qui a gagné, entre autres, le 2e Prix centro-américain Carátula des nouvelles courtes en 2014, Rodrigo Fuente.

Rodrigo Fuentes nous entraîne essentiellement dans la ruralité du Guatemala, dans un univers qui fait sérieusement penser au far west de l'époque de la conquête de l’ouest.

mercredi, mars 21, 2018

"Ce que tu es" de Herman Gorter (Pays Bas)

« Ce que tu es » présente la poésie du géant des lettres néerlandaises Herman Gorter (1864-1927), s’ouvrant par une Ouverture donnant des éléments bio-bibliographiques de façon très sensée et sensible. Puis suivi par Mai, le magnifique poème emblématique connu de tous dans une magnifique traduction qui permet ici de rendre en langue française toute la splendeur d’une langue et d’une civilisation. Un autre printemps, un autre son :

"Trois poètes néerlandais", Nachoem M. Wijnberg, Esther Jansma et K. Michel (Pays Bas)

Trois magnifiques poètes néerlandais sont présents dans cette anthologie avec des personnalités bien différentes. Ouvrant le livre, Nachoem M. Wijnberg, né le 13 avril 1961 à Amsterdam, trouve toute son ampleur dans ses derniers poèmes de La vie de avec toute une ressource onirique autour des livres, de l’amour et de la vie, ces poèmes de maturité viennent dépasser tous les précédents à un point tel qu’il aurait fallu ne publier que des poèmes du recueil La vie de (2008) cette beauté et cette bonté réunies exaltent vraiment. Esther Jansma, née le 24 décembre 1958 à Amsterdam, occupe le milieu de l’anthologie, toute à ses fantômes et à une poésie extrêmement sensible, elle nous emporte dans un univers dépaysant avec des cellules de poèmes indépendants parfois rattachés en série, cette composition complexe mais efficiente nous offre une poésie d’excellente qualité. 

"Du perdant & de la source lumineuse" de Kees Ouwens (Pays-Bas)

Recueil construit en système clos comme un système sanguin, "Du perdant & de la source lumineuse" est l’œuvre d’une poésie objective, où les éléments réels côtoient des métaphores à caractère réaliste, et dans la construction tout au long du recueil en italique apparaît des citations de Théorème de Pasolini qui renforce cet aspect-là. Ce sont aussi bien des éléments de paysages façonnés par l’homme (voitures) que des réflexions sur la vie elle-même dans la modernité de l’existence. Il y a aussi le révélateur de la lumière qui permet de percevoir une certaine philosophie de la vie, une vraie ontologie et parfois se développant vers une métaphysique très personnelle.

lundi, février 05, 2018

"Simple mortelle" de Lilian Bathelot (France)

Bon, c’est une chose entendue pour nous, on aime bien La Manufacture de Livres. On en pinçait déjà pour Anne Bourrel et Franck Bouysse… et aujourd’hui j'en pince pour Lilian Bathelot, et surtout pour Nicole et Louis !
Il est étonnant ce roman noir qui réussit le tour de force d’allier une histoire d’amour lumineuse avec une sordide conspiration politico-mafieuse d’état ! Difficile d’en dire beaucoup plus sans risquer de casser quelques uns des ressorts que nous réserve ce récit très construit et dans la première moitié duquel les scènes se suivent sans qu’on n’en saisisse franchement toutes les articulations… Les personnages principaux sont dépeints de manière très sensible, et la richesse des personnages secondaires laisse facilement imaginer que Lilian Bathelot a encore plein d’histoires à nous raconter ! Bref, le genre de lecture un brin addictive, de celles qui oppressent autant qu’elles font du bien…

vendredi, janvier 19, 2018

"Les âmes errantes", de Tobie Nathan (France)

Tobie Nathan est professeur de psychologie à Paris 8 et ethnopsychiatre. Il a beaucoup travaillé sur les migrants.
Pendant trois ans, il a reçu des jeunes en voie de radicalisation qui lui ont raconté leurs histoires familiales et personnelles. Il a tenté de comprendre leurs parcours de vie et nous explique dans ce livre leur façon de penser.

Il se sent proche de ces jeunes, car comme eux il est issu d'une famille de migrants, arrivé en France à l'âge de 8 ans.
Il déplore le manque de racines culturelles de certains d'entre eux et c'est la raison pour laquelle ils les qualifient d'«âmes errantes » :

« Je qualifie d' « âme errante » cette fille non pas détachée, puisqu'elle n'a jamais été liée ; non pas égarée, puisqu'elle n'a pas de lieu à retrouver, d'Ithaque à rejoindre ; mais flottante, angoissée, animée d'absence. Cet être est bon à prendre, à soumettre – c'est une proie pour les chasseurs d'âmes.
Voilà donc une formule majeure, le sésame des « âmes errantes », devenues proies faciles d'une radicalité religieuse montante. La formule se décline sur deux générations : perte du lien fonctionnel avec l'appartenance culturelle (la source) à la première, problèmes de filiation à la seconde.

vendredi, janvier 12, 2018

"Aux Cinq Rues, Lima" de Mario Vargas Llosa (Pérou)

Pourquoi donner envie de lire « Aux Cinq Rues, Lima » dont Gallimard vient de publier la version française ? Parce Mario Vargas Llosa est prix Nobel de littérature ? Parce qu’il est entré l’an dernier, de son vivant, dans la Pléiade ? Un peu court comme raisons !
Alors, pourquoi ? Parce que, à quatre-vingt un ans,cet homme ne lâche rien et nous entraîne dans un roman jubilatoire. Mené sur un rythme haletant, avec l’habileté et le talent de conteur qui est le sien, il nous plonge au cœur de Lima, dans un quartier très vivant, autrefois mal famé, Cinco Esquinas. Nous nous retrouvons au cœur d’une comédie de mœurs et d’un scandale politico-médiatique avec des photos compromettantes, un maître-chanteur, un crime crapuleux, de quoi alimenter la presse à scandale.

jeudi, janvier 11, 2018

"Légende d’un dormeur éveillé" de Gaëlle Nohant (France)

« Le dormeur éveillé », c’est Robert Desnos, c’est ainsi que le nommait André Breton. Gaëlle Nohant dans ce gros roman de 520 pages nous raconte sa vie, son parcours, sa fin tragique et, à travers lui, ressuscite toute une époque, une époque riche, passionnante et douloureuse, des années folles à la fin de la deuxième guerre mondiale. C’est toute la vie littéraire et politique, de 1928 à 1945, qui défile sous nos yeux, toute une génération d’artistes, d’écrivains, de peintres que nous connaissons et qui deviennent les acteurs de cette « légende ». Ce livre, nous dit l’auteure, est né de sa passion pour l’œuvre de Robert Desnos et est le fruit d’un long travail de recherches qui lui a pris plus de deux ans. Tout ce qu’elle dit est intéressant, tout semble exact et des extraits de poèmes de Desnos ponctuent son récit pour rendre la présence du poète plus évidente.

Que 2018 soit aussi passionnante que les années passées !

Les Collecteurs vous souhaitent leurs meilleurs vœux pour 2018 et vous font partager leur album souvenirs !

 

mercredi, décembre 06, 2017

"Le corps des ruines", de Juan Gabriel Vasquez (Colombie)

Juan Gabriel Vasquez a dû lire « Si par une nuit d’hiver un voyageur » de Italo Calvino.
Ou bien, s’il ne l’a pas lu, il s’est intéressé aux récits enchâssés.
Car sinon pourquoi embarquer le lecteur sur des chemins de traverse, abandonner le narrateur à ses angoisses de paternité, au moment de la naissance de ses deux jumelles prématurées, délaisser le sympathique Docteur Benavides, retrouvé justement au moment de l’accouchement, et interrompre même le premier récit historique pour un autre récit historique plutôt fumeux, et y consacrer plus d’une centaine de pages de ce « Corps des ruines » ?

Tout commence en effet par le retour du narrateur dans son pays natal, la Colombie, et par une interrogation concernant le « récit national » officiel enseigné dans les écoles.

Et si le brillant Jorge Eliecer Gaitan n’avait pas été assassiné le 09 Avril 1948 ? Etait-ce vraiment l’affaire d’un seul homme, lynché peu après ? Ou bien la mystérieuse vertèbre datant de son autopsie révélerait-elle un autre meurtrier ?