Lumineuse idée, de faire d'une « Susan » éperdue, indispensable et maltraitée, la narratrice de
« Sarah quand même » ! Les grands créateurs – et créatrices – ont souvent besoin d'esclaves utiles, tour à tour amantes (très brièvement, ici), confidentes, interfaces entre leur brio et la vie quotidienne… voir Marguerite Yourcenar et Grace Frick, Beauvoir et Bianca Lamblin…
Grâce à Susan, donc, à qui Régine Detambel prête sa plume étourdissante, nous accompagnons Sarah Bernhardt dans les vingt dernières années de son existence, qui ne sont pas les moins tumultueuses. Ne plus être enveloppée de « la gélatine de la jeunesse » n'empêche Sarah ni de foncer ni de séduire. Cette affamée de succès joue tous les rôles, masculins ou féminins (L'Aiglon, Hamlet, Phèdre, Tosca…) À la scène comme dans la vie, la ligne de démarcation entre les sexes ne sera jamais pour elle un obstacle. La différence d'âge non plus. Bientôt septuagénaire elle parcourt les États-Unis, en tournée avec son jeune amant Lou Tellegen, de presque 40 ans son cadet.