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vendredi, avril 11, 2014

Semana Cultural de l'AFCM : Soirée poésie du 4 avril 2014 #2

Notre soirée Poésie s'est poursuivie en compagnie du poète-écrivain...
(Pour le début de cette soirée, voir là : Semana Cultural de l'AFCM : Soirée poésie du 4 avril 2014 #1)
Alors, qui est plus précisément Darío Jaramillo Agudelo ?


Dans son essai “Historia de una pasión”, Darío Jaramillo Agudelo annonce la couleur : “Lo que a mí me gusta es escribir” “Ce qui me plaît, c'est écrire : cette cérémonie privée de mes heures nocturnes, entre le Nescafé et les Pielroja, en silence ou en musique(...), c'est ce travail si absorbant et si plein d'humilité qui depuis des années, par habitude, m'occupe de neuf heures du soir et une heure du matin, ces heures que je passe à gribouiller sur des cahiers mes poèmes et mes lettres, mes compte-rendus et mes récits. Ce métier auquel est liée une euphorie spéciale, si spéciale qu'elle se situe à la fois dans le cœur, dans la tête et dans l'estomac, ce métier solitaire se suffit à lui même parce qu'il porte en lui le plaisir qu'il procure. Le plaisir de l'image, de l'histoire qui naît en toi et qui prend possession de ta main pour se transformer en mots. Même le plaisir de corriger les textes. Je corrige en raturant les cahiers de sténo que j'utilise pour écrire, et j'intercale des phrases au dos de chaque page que j'ai exprès laissé en blanc au départ. Je dactylographie moi-même une partie de ces manuscrits, en raturant et en intercalant encore de nouvelles corrections.
Publier c'est autre chose. Un acte public. Il serait ingénu de ne pas reconnaître que, d'une certaine façon, publier influe sur l'acte même d'écrire, d'abord en nous rendant plus rigoureux, plus discipliné, plus exigeant avec l'écriture. J'essaie depuis toujours d'être sélectif avec mes poèmes, avec une proportion de un pour dix, voire moins encore, entre ce que j'écris et ce que je publie, et je fais en sorte qu'entre une chose et l'autre il y ait au moins un an d'intervalle, de façon à ce que je puisse faire la dernière correction en lisant le texte comme s'il avait été écrit par quelqu'un d'autre. »
=> Pour en savoir un peu plus sur sa biographie, vous pouvez vous reporter à cet article : Darío Jaramillo Agudelo, un talent colombien méconnu en France !
Il raconte par ailleurs que les premières lectures qui l'ont durablement marqué ont été TS. Eliot, Malcom Lowry, Tomás Eloy Martínez et Augusto Monterroso. Puis aussi un peu plus tard, hormis l'incontournable Borges, il y a eu Nicanor Parra, un chilien, presque centenaire aujourd'hui qui a reçu le Prix Cervantez en 2011, qui se définit comme anti-poète et dont l'œuvre la plus connue est Poemas y Antipoemas (qui n'est toujours pas traduit en français), où il substitue un langage direct et quotidien à la syntaxe soignée et métaphorique qui caractérise d'habitude la poésie dans l'imaginaire commun. Et enfin, Macedonio Fernández (traduit en français par Supervielle), un argentin ami de Borges, qui lui aussi a placé l'expression simple et directe au cœur de son œuvre.
A propos de la foisonnante vie artistique de la Colombie, il dit : « l'effervescence créative est quasiment une forme de défense face à une situation difficile. » Et lui même a été personnellement touché par la violence qui frappe depuis de nombreuses années la Colombie puisque le dernier dimanche du mois de février 1989, il s'est trouvé proche d'une bombe qui a explosé et qui lui a volé, dit-il, le talon d'Achille de son pied droit. (...) « J'ai donc, comme n'importe quel moribond, déjà un pied dans la tombe. » explique-t-il avec humour...
Parmi les auteurs français, Jean Cocteau occupe une place particulière. Dans Historia de una pasion, il explique que Cocteau disait : « Le poète est aux ordres de ses nuits ». Depuis cette époque, il m'arrive des trucs avec Cocteau : souvent je me rends compte qu'il a déjà exprimé avec talent une chose que je pense depuis toujours ; par exemple « Je sais que la poésie est indispensable, mais j'ignore pourquoi ». Ou par exemple : « Le poète est un menteur qui dit toujours la vérité ». Ou encore quand il dit « Un vrai poète se préoccupe peu de la poésie. Tout comme le jardinier ne parfume pas ses roses ».
De son écriture, il dit : « Je parle de ce que je connais, mais pas avec l'intention d'expliquer parce que moi même je n'y comprends rien. » L'écriture de Jaramillo se caractérise par un ton qui est le plus près possible du langage parlé au quotidien, la fluidité est son maître-mot et selon Fernando Charry Lara, "il est de ces poètes qui préfèrent écrire avec leurs propres mots, avec ceux de leur entourage, plutôt qu'avec ceux qui ont déjà été écrits auparavant. ».
D'ailleurs, à propos de la traduction, c'est aussi ce qui le guide, ce qu'il recherche. A la question « Comment reconnaît-on une bonne traduction ? », il répond - précieuses indications pour la traductrice que je suis ! - que la première chose qu'il demande c'est qu'elle soit écrite en bon espagnol, qu'elle soit fluide dans la langue dans laquelle il lit. Les poèmes rimés dans la langue d'origine, il préfère les lire sans rime dans la traduction en espagnol. Pour lui, l'idéal c'est que l'on puisse lire en espagnol des auteurs écrivant dans d'autres langues, et que l'on puisse les découvrir sans que la présence de l'intermédiaire « traducteur » ne se remarque...
Voilà, il y aurait sans doute encore beaucoup à dire, mais il y a en fait surtout beaucoup à lire ! Poèmes, romans et même essais, Jaramillo a gâté le lecteur !

Avant de passer à la deuxième partie de notre soirée dans un article suivant - nous y parlerons de des échanges qui ont eu lieu avec nos invités poètes languedociens, François Szabó, Michel Arbatz et Christian Malaplate -, nous vous proposons un petit intermède vidéo pour mieux faire connaissance avec Darío Jaramillo Agudelo et sa poésie !
Darío Jaramillo Agudelo au Festival Internacional de Poesía de Medellín, 2010...

La suite du récit de cette soirée ici : 

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