Il s'agit d'un recueil de nouvelles courtes, de « choses vues » à Cuba entre les années 1956 et 1961, période cruciale dans l'histoire de la grande île, avec la guerrilla et la révolution menées par Fidel Castro. Les textes écrits sur le moment ayant été confisqués au départ de Cuba, l'auteur a dû les réécrire bien plus tard pour ne les publier qu'en 1998, après plusieurs romans et œuvres poétiques qui lui ont permis de se placer parmi les écrivains équatoriens les plus reconnus de sa génération.
Alicia
Yànez Cossío, équatorienne, est née à Quito en 1928 et a fait
preuve très jeune de sa vocation littéraire. Étudiante en Espagne
au début des années 1950, elle y épouse un jeune cubain étudiant
en droit. Le ménage séjourne ensuite en Équateur par moments, et à
Cuba. D'abord favorable à la révolution et voulant y prendre part,
le couple sera bientôt déçu par la rapide dérive dictatoriale et
devra s'exiler avec ses enfants en abandonnant tout sur place...
Le
style est concis, sans fioritures, mais l'économie de moyens
n'interdit pas l'émotion. Au fil des pages on ressent une réelle
affection pour le petit peuple cubain, sa culture, et sa façon de
parler l'espagnol, finement restituée dans les dialogues.
Si
les deux premiers textes sont des portraits hagiographiques du Che et
de Camilo Cienfuegos, figures de la révolution cubaine, la première
impression d'un livre au parti-pris univoque se dissipe rapidement.
Les nouvelles suivantes illustrent les souffrances des petites gens,
des enfants, des cireurs de chaussures, des idiots, ou des héros
anonymes, des révoltés rejoignant la guerrilla, ou des adolescents
enrôlés de force dans l'armée... Ce sont toujours les mêmes qui
payent le prix des guerres. On perçoit une préférence pour la
révolution, sans manichéisme, car même le jour de la victoire,
c'est du point de vue d'une femme de combattant cherchant en vain son
homme parmi les « barbudos » que la nouvelle balance
entre allégresse et détresse.
Puis
viennent les dénonciations, l'épuration, les exécutions, les
amitiés brisées et les familles déchirées et l'exil...
Il
est regrettable que ces quatre-vingt-dix belles pages aient échappé
à la vigilance des éditeurs français.
Antonio
Borrell
Quelques
extraits sélectionnés par LH…
p. 40 – Los dos bandos(…) Los de un bando y otro se ocultaron tras los pilares de los portales, en las salientes de las paredes y en los quicios de las puertas. Era igual que en las películas del Oeste, sólo que los buenos y los malos morían de igual manera, con el mismo desplome y la misma voltereta, en un momento paradójico en que los buenos podían ser malos y los malos tal vez eran buenos, y todos por desgracia eran hermanos e iban a matarse sin remedio. (…)p.66 – Antolín(…) El viejo sufría por la revolución que era suya, tan suya como la cojera que llevaba a cuestas, la cicatriz en la mejilla y la angustia de ver que los ideales tomaban nuevos rumbos. Le costó largas horas de desvelo tomar la decisión de exiliarse atravesando las noventas millas de distancia.(…)p.83 – Tita Divó(…) Una tarde salió temprano y no regresó a dormir. Cuando volvió, era otra. Llegó con la mirada desvaída de la noche en vela y los párpados maltratados por el flujo de las lágrimas. Pidió que le pagaran su salario.- ¿Nos dejas… ? ¿Por qué… ? - le preguntaron inquietos, imaginándose los posibles y imposibles.- E un secreto – respondió mordiéndose los labios. Pero el secreto le pesaba y al fin estalló-: E hora de levantá el campamento. ¡Se me yenó la cachimba…! Me voy antes que ustés, rumbo a la Jamaicas.Se quedaron perplejos. Le acosaron a preguntas:- Tita, ¿qué pasó? ¿Tienes papeles? ¿Cómo los conseguiste…?- ¡Qué papel ni ná! ¡Perdedera e tiempo! Si ustés con ser blancos no consiguen ná, ¿quién le va a da papele a una negra… ? (…)
Et
pour en savoir plus sur cette autrice équatorienne, née en 1928,
pour le moment totalement ignorée en France, allez donc lire ces
interviews :
ALICIA YÁNEZ COSSIO, entrevista realizada por: Miguel Molina Díaz
« Retratos
cubanos » d’Alicia Yánez Cossío. Editions
Seix Barral, Planeta Ecuador, Quito, 1998, 90 pages.
Merci pour cet article précis qui donne envie de découvrir ces "Retratos cubanos"!
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