Quelques mots sur un petit livre qui m'accompagne depuis quelques années, quelques décennies même, et que je rouvre toujours avec le même plaisir : les Histoires enfantines de Peter Bichsel. Écrivain suisse allemand peu traduit en France (né en 1935 à Lucerne). Ses Histoires enfantines avait été publiées une première fois par Gallimard en 1971, soit dans la foulée de l'édition originale (1969) et c’est Le Nouvel Attila qui les a rééditées il y a quelques années enrichies d'illustrations.
Pleins d'humour et de sens de l'absurde, ce sont sept contes drolatiques et profondément philosophiques qui questionnent la vérité, le langage et le monde. Les personnages sont juste un peu bizarres, mais d'une logique sans reproche. Ainsi cet homme qui voulait savoir ce qu'il savait, qui voulait vérifier ce qu'il savait, à savoir si la terre est vraiment ronde. Et aussi cet homme gris qui vit dans un monde gris et commence à le changer en changeant les mots puis en réinventant la langue, rien que pour lui. Et encore ce grand-père qui parle de l'oncle Yodok et qui, jour après jour, réduit le langage à l'essentiel, aussi loin que cela peut se faire. Vous croiserez également un homme qui s'échine à inventer ce qui existe déjà, et cela est bien difficile... Autant de fables qui naviguent à contre-courant du réel pour mieux le questionner, le mettre en déséquilibre, jusqu'à nous laisser en suspens au bord de nos certitudes. Cela avec une bienveillance qui pourrait passer pour enfantine mais qui l'est beaucoup beaucoup moins qu'il n'y paraît.