À redécouvrir: Le dernier visage d'Álvaro Mutis
L’auteur distille
cette alchimie délicate et secrète qui transforme une histoire simplement
racontée avec des mots en un récit passionnant suivi du début à la fin sans que
l’ennui s’insinue dans la lecture et qui fait dire au lecteur qu’il a bien aimé
le roman.
Hervé Gautier
Après la fin de la deuxième guerre mondiale, une librairie en liquidation vend un ensemble de manuscrits dont l’auteur est le Colonel de lanciers polonais Miecislaw Napierski.
Attiré par la mention d’un lieu et une date: «Santa Marta, décembre 1830», le narrateur découvre dans ces pages ce qui constitue un épisode de l’histoire de la Colombie et qui raconte des faits en relation à un homme et aux circonstances de sa mort.
Napierski écrit qu’après la mort de son épouse, il est allé
en Colombie offrir ses services aux armées de libération, mais ayant était
incarcéré lors d’une escale à Cuba, il n’a embarqué vers Cartagena de Indias
que lorsqu’ il a réussi à s’enfuir de prison quelques années après, quand les
guerres d’indépendance avait été gagnées.
Lors de son arrivée, il est conduit en présence de Bolívar
qui s’était installé, en attendant de quitter le pays, au Pie de la Popa, dans
un ancien couvent devenu une forteresse.
La demeure est décrite comme étant délabrée, avec des tâches
d’humidité sur les murs et pauvrement meublée. La pièce dans laquelle il
rencontre El Libertador confirme la première impression sur le dénuement dans
lequel vit Bolívar, sans meubles, ni ornements, seulement une chaise à haut
dossier tournée vers une cour intérieure, un lit et une table couverte de
livres et de papiers.
Bolívar parle d’une voix qui laisse percevoir une grande
faiblesse physique. Il ne peut pas se lever pour accueillir ses visiteurs. Son
visage a une expression de gravité désabusée, teintée d’une amère
mélancolie ; cependant ses traits, ses yeux, son menton et son nez
prononcé lui confèrent l’apparence d’une vivacité énergique.
Durant la conversation, Bolívar manifeste sa déception
d’avoir lutté pour un pays qui ne veut plus de lui et ne lui reconnait pas les
services qu'il a rendu à la nation.
Les protestations de ses adjoints n’effacent pas l’abandon et l’oubli dans
lequel se trouve Bolívar.
A partir de ce jour et durant les deux semaines suivantes,
Napierski et El Liberatador se retrouvent pour discuter, les jours où l’état de
santé de celui-ci le lui permet.
Napierski nous fait part des souffrances physiques de
Bolívar et de la manière dont son état se détériore, à cause de la fièvre et
des quintes de toux qui le font saigner et le laissent exsangue.
Il décrit Bolívar qui fut si fortuné avec les femmes, comme
un militaire et un politique derrière lequel perce l’homme du monde, préférant
à cette époque de sa vie les manières simples et directes. Quelqu’un
connaissant les ressorts qui guident
l’ambition des hommes au pouvoir, devenu sceptique et ne pouvant pas empêcher
froideur et retenue dans ses relations
Bolívar livre, durant ses conversations, son analyse sur la
situation des pays américains, de leurs luttes intestines, des égoïsmes de ceux
autrefois soumis à la tyrannie, qui tyrannisent à leur tour.
La déception et l’amertume sont grandes chez Bolívar, qui
malgré la compagnie de quelque loyaux amis, ne trouve pas de réconfort.
La nouvelle de l’assassinat du Maréchal Sucre, dans de
sombres circonstances, fait plonger Bolívar dans une profonde tristesse et dans
le désespoir. Il voit dans la mort de cet ami qu’il chérissait comme un fils
l’ultime trahison et l’annonce sans équivoque de sa mort prochaine.
Álvaro Mutis, né le 25 août 1923 à Bogotá, est un poète et
romancier colombien vivant au Mexique.
Fils d‘un diplomate colombien, Alvaro Mutis a deux ans
lorsque son père obtient un poste à l'ambassade de Colombie à Bruxelles. Il
passe son enfance en Belgique, jusqu'à la mort de son père en 1932. Il retourne
alors en Colombie, où il vit avec sa mère et son frère cadet Leopoldo dans un
domaine agricole, la hacienda Coello.
Après avoir abandonné tôt ses études, Mutis travaille à la
radio comme présentateur de journaux et anime une émission littéraire. Au cours
des années 1940, il commence une carrière de rédacteur publicitaire et de
responsable des relations publiques pour diverses entreprises (assurances,
compagnies d'aviation [Lansa], compagnies pétrolières [Standard Oil, ou Esso],
studios de cinéma [Columbia Pictures]). Cette vie de représentant de compagnies
internationales transparaît dans son œuvre, notamment dans les romans où il se
met en scène comme narrateur voyageant pour affaires, colloques ou visites
d'exploitations pétrolières.
En 1948, Mutis publie à un tirage confidentiel sa première
œuvre poétique, La Balanza, en collaboration avec Carlos Patiño Roselli.
Son amitié avec Gabriel García Márquez débute en 1950.
En 1956, Mutis s'installe à Mexico. D'abord poète, Mutis, au
cours des années 1970 et 1980, s'affirme comme romancier. Il développe à partir
de 1985 une série de romans autour d'un personnage, Maqroll el Gaviero (Maqroll
le Gabier), aventurier toujours au bord de la misère et marin partout sur le
globe, tant sur les mers que sur les fleuves et les rivières, et qui apparaît
déjà dans ses poésies à partir du recueil Los elementos del desastre (Les
Éléments du désastre), paru en 1953. Il crée autour de ce personnage errant
d'autres protagonistes, comme la famille Bashur, des négociants libanais, dont
il détaille, roman après roman, les aventures dans le monde trouble des
affaires maritimes, des pavillons de complaisance, et des cargaisons douteuses,
avec un style contemplatif et désenchanté. Ses œuvres ont rencontré un grand
succès tant en Amérique latine qu'en Europe.
En 1974, Mutis reçoit le Prix littéraire national de
Colombie.
En France, il a reçu, en 1989, le prix Médicis étranger pour
son roman La Neige de l'amiral.
En Espagne, il est lauréat du prix Prince des Asturies
(1997), du prix Reine Sophie de poésie ibéro-américaine (1997) et du prix
Cervantes (2001).
Œuvres (liste non exhaustive)
Poésie: La
Balanza (1948), Los elementos del desastre (1953), Summa de Maqroll el Gaviero,
(1973)
Romans et
nouvelles: Diario de Lecumberri (1960), La mansión de Araucaíma (1973), La
Nieve del Almirante (1986), Ilona llega con la lluvia(1987), La última escala
del Tramp Steamer (1989), La muerte del estratega (1990), El último rostro
(1990), Abdul Bashur, soñador de navíos (1991)
Essais: Celebraciones y otros fantasmas (1993), Contextos para Maqroll
(1997),
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