samedi, novembre 28, 2020

"La grammaire de Dieu", de Stefano Benni (Italie)

 

C’est un peu par hasard – merci aux bibliothèques, des trésors de bonnes surprises – j’ai découvert l’univers de Stefano Benni, auteur italien né à Bologne en 1947, grâce à ce recueil de nouvelles « La Grammaire de Dieu ».

Avec une palette de sujets très large, l’auteur détaille les travers de nos vies contemporaines, avec un regard à la fois amusé – un brin moqueur – et bienveillant en y ajoutant souvent une forme d’exagération et d’emphase, propre à son style, comme s’il observait nos comportements à l’aide d’une loupe grossissante.

La nouvelle qui m’a fait le plus rire s’intitule « Plus jamais seul » : un homme qui n’a ni femme, ni amis ni même un « demi-ami » se désole. Magasinier dans un dépôt de médicaments, il va chez trois coiffeurs différents pour tuer le temps. Iris, la barmaid du Mocabar, son bar préféré, ne lui sourit jamais.

Mais sa vie va basculer lors qu’il tombe sur une publicité : « avec Soleil, plus jamais seul ».

Soleil est une marque de portable, et l’on voit une fille bronzée téléphonant à tout un tas d’amis. Notre héros a donc la solution : il lui suffit de pousser la porte de la boutique de téléphonie et la vie va lui sourire. A partir de là, Iris la barmaid l’interroge sur le modèle choisi. Son chef le considère enfin, et lui envoie des SMS  supposés être très drôles. Et même si personne ne l’appelle, il marche jusqu’à tard dans la rue, son téléphone à la main, jetant quelques phrases de ci-de là comme un homme moderne. Et parce que son téléphone ne sonne jamais, il trouve une parade : il s’achète un second portable, avec lequel il peut s’appeler très régulièrement …

On pense à l’humour génial de « La vie très privée de Mr Sim » de Jonathan Coe, quand il constate, avec un grand soulagement, au retour d’un voyage, qu’il a une centaine de messages dans sa boite mel … soulagement tout relatif quand il se rend compte que ces nombreux messages sont surtout des propositions publicitaires pour de l’achat de viagra en ligne.

Il faudrait encore citer le savant, recherchant partout l’homme « le plus seul du monde » mais qui aura de nombreuses déconvenues en découvrant que les hommes qui paraissent tout à fait seuls sont souvent d’excellents business men qui savent très bien communiquer sur leur pseudo solitude.

mercredi, novembre 25, 2020

"Entre fauves" de Colin Niel (France)


Après la Guyane où il nous a emmené plusieurs fois, c'est en Afrique du Sud, plus précisément en Namibie, que Colin Niel nous transporte, avec un ancrage du côté des Pyrénées, au cœur du Parc National et de la vallée d'Aspe. Au départ, une photo qui circule sur les réseaux sociaux, celle d'une jeune chasseresse au regard dur, voire cruel, avec son arc à la main et derrière elle le cadavre de sa victime : un lion parmi les plus rares et les plus protégés. À la brutalité de cette image qui exhibe la mort et la fierté ou le plaisir d'avoir tué, répond une autre violence qui veut pourrir la vie de cette chasseresse au travers des réseaux internet, la livrer à son tour en pâture à un autre type de chasseurs. Mais personne ne sait qui elle est. Personne ne parvient à l'identifier. Mais c'est sans compter sur Martin, le garde expérimenté du Parc National, qui va lui aussi se mettre en chasse…

jeudi, novembre 19, 2020

"L'autre moitié de soi", de Brit Bennett (Etats-Unis)

 

Desiree et Stella sont deux jumelles noires.

Nées dans une petite bourgade, Mallard, peuplée de personnes noires, à une époque où les noirs st les blancs ne se mélangent pas.

C’est un drame familial (le père, tué par des Blancs, pour d’obscures raisons) qui est à l’origine de leur histoire. Adolescentes, elles fugueront ensemble à la Nouvelle Orléans.

Mais là, leur destin va bifurquer. Desiree la plus sage en apparence, restera parmi les siens, épousera un homme très noir et aura une fille avec lui – Jude. Battue par ce mari violent, elle le quittera sur un coup de tête, pour rejoindre Mallard et retrouver sa mère, ainsi que le chasseur de primes, embauché par son mari pour la retrouver, mais lui-même amoureux de Desiree dans le passé, qui deviendra son compagnon et un père de remplacement pour Jude.

Quant à Stella, elle réussit, parce que sa couleur de peau le lui permet, à se faire passer pour une blanche. Et vivre une vie de blanche, épouser son patron, un riche business man, et même avoir une fille totalement blanche, prénommée Kennedy.

De la couleur de peau il est vraiment question dans tout ce roman trépidant, où l’on suit tour à tour l’histoire de Desiree qui revient à la maison, puis Jude jeune adulte fuyant sa mère et sa grand-mère, puis la quête de Desiree pour retrouver sa sœur – en vain.

Peut-on vivre en permanence sur un mensonge ? Ce roman pose bien sûr la question de l’identité.

samedi, novembre 14, 2020

"Saturne", de Sarah Chiche (France)

 

Selon la mythologie, Saturne est un Dieu dont la cruauté potentielle a été renforcée par son identification avec Cronos, connu pour avoir dévoré ses propres enfants. Selon le mythe, il devint roi des Dieux mais refusa de libérer les Cyclopes et les Cent-bras. Il se maria avec sa sœur Rhéa. On  prédit à Saturne qu'il serait lui-même détrôné par ses propres fils :  Il décida alors de manger tous ses enfants, Hestia, Cérès-Déméter, Junon-Héra, Pluton-Hadès, Neptune-Poséidon.

Nul doute que Sarah Chiche a placé son roman sous la tutelle d’un Dieu étonnant. Elle a aussi certainement vu la reproduction du tableau de Francisco de Goya, peinte entre 1819 et 1823 directement sur les murs de sa maison dans les environs de Madrid.

Son récit s’ouvre sur ce qui va engendrer le traumatisme dont la narratrice et auteure va souffrir toute son enfance : l’enterrement de son père, alors qu’elle n’a que 15 mois, et que personne ne lui dit explicitement que son père est mort.

Visiblement Sarah Chiche est née dans une famille que l’on peut considérer comme toxique – et elle va nous expliquer pourquoi, en le détaillant avec force détails. Harry, son père, est le cadet d’une fratrie de deux enfants, nés dans les années 40 en Algérie, dont le père est à la tête d’une grande clinique prospère. Après le retour douloureux en France, où comme de nombreux rapatriés toute la famille va souffrir du syndrome de l’exil, un second chapitre va s’écrire dans une clinique que le père va bâtir à l’image de celle d’Algérie.

En attendant la famille habite un château magnifique, où l’on fait bombance tous les jours. On tente de reformer le paradis d’Alger. Pendant ce temps, Harry, envoyé en pensionnat en Normandie, végète dans l’ombre de son frère aîné à qui tout réussit. Il va de soi qu’ils deviendront tous les deux médecins, comme le veut la tradition familiale, et la rare expression personnelle d’Harry qui dit son intérêt pour la psychanalyse est balayée d’un revers de main par son père.

jeudi, novembre 12, 2020

"Management 1.0 et réseaux sociaux : déjouer les rouages de la servitude volontaire", de Didier Romann (France)

 

J’aime bien le catalogue des Éditions L’Instant Présent, qui publient des livres autour de l’éducation et de la parentalité. Leur dernière publication est un peu différente mais tout aussi intéressante et même très intéressante : il s’agit d’un livre foisonnant, passionnant, rempli de réflexions et de pistes à explorer…

Son auteur est Didier Romann, qui a travaillé pendant 35 ans comme directeur des systèmes d’information.

Il a écrit ce livre pour nous raconter son expérience et nous faire partager ses réflexions sur le monde du travail aujourd’hui.

En introduction, il nous explique quels sont ses objectifs :

« Riche de mon expérience, je souhaite dénoncer l’ambiance détestable qui règne aujourd’hui dans la plupart des entreprises, avec ses effets dévastateurs sur le plan humain, mais aussi sur les performances économiques des organisations. Je nourris l’espoir d’une prise de conscience collective concernant la cupidité et l’irresponsabilité des acteurs du monde de la finance. »

L’auteur est à la fois très technique (quand il nous décrit les différentes facettes de son métier par exemple) et littéraire, lorsqu’il invente des pseudos ou des surnoms pour désigner ses collègues ou les managers, qui deviennent alors des personnages (qu’il nomme entre-autre : La Bienveillance, Cruella, le Félon, Monsieur Loyal, Narcisse, Le Patriarche, Persifleur, Le Tacticien, etc).

vendredi, novembre 06, 2020

Deux coups de coeur poésie (France-Grèce et France/Catalogne)

 


Le coup de cœur de l’année en poésie, poèmes en grec et en français par l’autrice Katerina Apostolopoulou, 

J’ai vu Sisyphe heureux est le formidable ensemble poétique à hauteur des œuvres des poètes grecs du XXème siècle, Ritsos, Elytis, Séféris, Sikélianos, Dimoula. 

 

Précieux livre à avoir toujours à portée de la main. Viatique de réconciliation avec le monde.