Dans
« La
Femme Brouillon » publié en septembre 2016 à la Contre
Allée Amandine Dhée parlait avec beaucoup de force et de justesse
associées à une belle pointe d’humour de la grossesse, de la
difficulté d’être à la fois femme et mère, de « la
violence d’être habitée par un autre », de la peur d’être
dépossédée de son identité, de celle aussi de ne pas être une
bonne mère et de son refus de n’être que cela. C’est un livre
qui nous avait beaucoup plus ici et dont Laurence avait parlé avec
enthousiasme.
Si
je rappelle cela c’est que je viens de lire « In
Utero » de Julien Blanc-Gras publié en 2015 au Diable
Vauvert et réédité en Livre de Poche. Si le titre n’est pas
génial, ...
... le livre est assez savoureux et est comme une version
masculine de « La Femme Brouillon » comme si ces deux
livres se faisaient écho. Julien Blanc-Gras est un
écrivain-voyageur insatiable qui fait une pause pendant la grossesse
de sa compagne. Il explore cette période de latence qui transforme
un homme en père et le fait avec beaucoup d’humour, avec distance
et dans un style fluide. Il dit ainsi : « On reproche
souvent aux écrivains français de se focaliser sur leur propre
nombril. Je vais me concentrer sur celui de La Femme » En même
temps il réfléchit sur la façon dont est vécue la grossesse à
travers l’histoire et la culture. Il parle aussi des problèmes
liés à la procréation dans notre belle société française :
« Cette
année, la famille revient au centre des enjeux de société. Des
hordes manifestent pendant des mois en répétant : « Un
papa, une maman ». La France est déchirée entre ceux qui
veulent accorder l’égalité aux homosexuels et les autoriser à
adopter, et ceux qui, peu ou prou, considèrent les pédés et les
gouines comme des sous-citoyens. C’est une bataille de l’enfant
qui se joue dans les rues. Des marmots sont enrôlés par leur
famille pour scander des slogans homophobes. Statistiquement, une
partie d’entre eux se découvrira homosexuelle à l’adolescence.
Ils se rendront alors compte qu’ils sont ce qu’on leur a appris à
détester. Drôle de conception de la protection de l’enfance.
Bonne chance, mes petits gars. » (p74)
Ce
journal d’une grossesse écrit par un homme est quelque chose de
peu courant. C’est le témoignage réjouissant d’un « nouveau
père » ou du moins de quelqu’un qui se souhaite comme tel :
« Si
je fais un enfant, je le fais comme il faut. Partager les tâches et
les dépenses me semble naturel. Ce n’est pas une position
idéologique, juste une question de politesse. Les vieux machos
ricanent quand les papas jouent à la maman. Ces jeunes, vraiment des
gonzesses. Je ne vois pas en quoi torcher les gosses ferait de moi
une maman. Ça fera de moi un parent. »
Une
seule chose m’a gênée dans ce petit livre bien mené. Julien
Blanc-Gras ne nomme jamais sa compagne. Elle est « La Femme ».
Volonté de glorification et d’universalité sans doute. Mais
personnellement j’y ai perçu un petit relent de machisme. Ce n’est
qu’un petit détail dont je suis sûre qu’il n’aurait pas plu à
Amandine Dhée !
Françoise
Jarrousse
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