Elsa
Osorio est née à Buenos Aires en 1952 où elle vit actuellement.
Elle est l'auteure de Luz ou le temps sauvage, Tango et Sept
nuits d'insomnie, tous publiés aux éditions Métailié. Ses
romans sont traduits en 18 langues.
Elle
a écrit La capitana entre 2007 et 2011, mais elle avait
depuis très longtemps l'envie d'écrire ce roman : tout a commencé
en 1986 en Argentine, lorsque l'écrivain Juan José Hernández lui a
parlé d'une femme argentine qui avait commandé des troupes pendant
la guerre civile espagnole. Elle a tout de suite été fascinée par
ce personnage, Mika Etchebéhère, qui vivait encore à l'époque, à
Paris. Elle s'est appuyée sur différents documents
historiques, et notamment sur des notes de Mika, pour écrire son
roman. Et pendant des années elle a mené une véritable enquête : elle
est allée sur les lieux où a vécu son héroïne et a recueilli
des témoignages ; à partir de là elle a inventé et écrit ce
roman.
Mika
quitte l'Argentine dans les années 1920 pour l'Allemagne, son
compagnon et elle étant animés par de fortes convictions politiques
et une envie de changer le monde :
« Lui
aussi a caressé cette idée, bien sûr qu'il aimerait commencer à
écrire ce livre et continuer de vivre comme ils le font, mais il a
lu les journaux qu'on leur a envoyés et il a bien réfléchi, il est
évident qu'ils ne peuvent s'éterniser en Patagonie ni à Buenos
Aires. C'est en Europe qu'il existe de solides organisations
ouvrières, avec une longue histoire, incomparable avec le caractère
naissant de la classe ouvrière latino-américaine ; c'est en
Allemagne que la lutte a lieu. Tu ne te rends pas compte, Mika ?
La vie nous file entre les doigts, a milieu de ces arbres
magnifiques.
Hipólito
a raison, c'est en Europe que se joue le destin de la classe ouvrière
mondiale, Mika le sait »
Le lecteur se trouve captivé par ce personnage : on a envie de suivre Mika à
travers son combat, en Allemagne, en France, en Espagne. A travers elle nous revivons et comprenons mieux certains événements historiques marquants, comme
la montée du nazisme en Allemagne, la guerre d'Espagne ou mai 68 à
Paris.
Mais
ce livre c'est aussi et surtout le combat d'une femme, qui se bat
dans un monde où ce sont les hommes qui dirigent. :
« Et
quand ils arrivèrent à destination, la proposition du commandant
Barros allait aggraver les choses : elle devait laisser sa
colonne à la charge de quelqu'un d'autre et venir avec lui, il la
nommait capitaine-adjoint.
- C'est une promotion ? Ironisa Mika sur le point d'exploser. Vous pouvez vous la garder.
Mais
ce n'était pas elle qui commandait ce bataillon, c'était Barros, un
militaire de carrière. Ou elle acceptait cette proposition ou elle
devait s'en aller et abandonner le combat. Ca, jamais. Elle déglutit
et s'efforça de paraître le plus aimable possible.
- Excusez-moi, camarade commandant. Reprenons les choses. J'ai besoin de comprendre votre proposition : si c'est une manière de m'écarter parce que le fait que je sois une femme est un problème pour les autres officiers, vous n'avez pas besoin de m'indemniser avec un grade à rallonge aussi inutile. - Elle essayait de se contrôler mais la colère la gagnait – Je peux revenir dans ma colonne et demander à un camarade d'en prendre le commandement, je préfère ça à un titre ronflant mais administratif et absurde. »
Mika est une femme forte qui a décidé de lutter jusqu'au bout, et même
dans ses vieux jours à Paris, elle reste une combattante. C'est ce
qui nous fascine, je crois : on n'a pas envie de la lâcher... On la
suit.
Après avoir porté cette histoire en elle tout au long des années, Elsa Osorio est parvenue lorsqu'elle l'a écrite à donner corps à son personnage. C'est
l'art du récit qu'elle nous fait découvrir finalement.
D'une
part elle entremêle les voix de différentes narratrices. Par moments
nous entendons la voix de Mika, à d'autres celle d'Elsa
Osorio-enquêtrice ; d'autres fois celle d'un témoin de la vie
de Mika. D'autre fois encore c'est la voix de la romancière, qui
parfois s'adresse à son personnage. Cette polyphonie permet au lecteur d'approcher différents aspects de la personnalité de l'héroïne.
D'autre part, Elsa Osorio a choisi de déconstruire la chronologie : cela donne une vraie force au récit.
L'histoire prend sens à la fin du roman, ce qui nous pousse à en
reprendre la lecture au début...
J'ai
lu la traduction française mais j'ai eu très envie de lire
le roman dans le texte original pour me rapprocher davantage de
l'héroïne...
Rachel Mihault
La capitana, de Elsa Osorio, éditions Métailié, 2012
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