Mais Soledad n’a personne de satisfaisant en vue pour cette soirée. Elle se tourne alors vers un site spécialisé et repère un Escort Boy qui fera l’affaire : Adam, 35 ans, magnifique –il fera sensation lorsqu’il s’assiéra à ses côtés, et l’ex-amant ressentira même peut-être une pointe de jalousie en le voyant à côté d’elle – c’est du moins ce que se dit Soledad dans son for intérieur.
Normalement Adam aurait dû rentrer dans Madrid une fois l’Opéra terminé. Mais un curieux incident devant un restaurant chinois que Soledad connaît bien en décidera autrement : en défendant le propriétaire du restaurant d’une agression à l’arme blanche, il va contraindre Soledad à l’inviter à se remettre les idées en place dans son prestigieux appartement madrilène, ce qui n’était pas du tout au programme …
Commence alors une relation tumultueuse entre Soledad et Adam. Désir ? Amours tarifées ? Relation amoureuse ? Difficile à déterminer, Soledad oscillant entre addiction à la chair du beau jeune homme et fascination pour son rôle de maîtresse femme achetant des vêtements magnifiques à son compagnon …
Rosa Montero excelle à dépeindre la femme de 60 ans, en lutte perpétuelle contre les méfaits du temps. « Le corps était une chose terrible, en effet. La vieillesse et la détérioration s’y tapissaient insidieusement et l’intéressé était souvent le dernier à l’apprendre.”
Il y a des pages hilarantes, notamment celle où elle décrit la valise d’une femme de son âge en déplacement : une liste infinie de produits pour combler les défauts inévitables qui apparaissent à la soixantaine.
On ne dira rien du final de cette relation improbable ni du passé de l’un ou de l’autre, comme le demande l’autrice à la fin du roman. Son souhait qu’on ne révèle pas les dessous de l’histoire, afin de ne pas « divulgacher » (c’est la traduction française proposée pour « Spoiler ») l’histoire pour les futurs lecteurs, sera respecté. On dira juste que Soledad dans ce récit va rencontrer une certaine journaliste nommée… Rosa Montero – une scène les réunissant toutes deux très réussie – encore un clin d’œil au lecteur qui se régale de ces inventions.
Nous sommes nombreux à être fans de Rosa Montero, pour ses romans qui nous sont familiers : « Le roitransparent » dans lequel une jeune femme revêt une armure et vit sous l’identité d’un homme au Moyen Age, « Des larmes sous la pluie », qui nous plongent dans un hypothétique futur peu reluisant, ou encore le très drôle « Folle du logis » plein d’inventivité. Cette romancière et journaliste madrilène, très appréciée en Espagne, nous est familière à Montpellier puisqu’elle est venue souvent à des rencontres littéraires pour notre plus grand bonheur.
Avec « la chair », ce roman plein de sensualité, de férocité et de tendresse pour les personnages, on retrouve son humour, son regard plein d’acuité pour traiter d’un sujet passionnant – quelques 180 pages délicieuses qui valent vraiment mieux que tous les magazines féminins sur le sujet.
Florence Balestas
La chair, de Rosa Montero, traduit par Myriam Chirousse, éd. Métailié, 2017
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